Changement de cap : Quand le capitaine de la recherche devient le compagnon de bord
Lorsque ses résidents commencent leur programme d’études supérieures sous sa direction, le Dr Silvano Mior leur dit que son objectif est de les rendre plus intelligents que lui à la fin du programme. Parmi les étudiants à qui il a enseigné, bon nombre sont devenus des chercheurs et des leaders réputés à l’échelle nationale et internationale. Maintenant, après plus de 40 ans, les étudiants en résidence et ceux inscrits à des programmes d’études supérieures représentent toujours une source de motivation pour lui.
« Ces chercheurs sont tellement brillants que je passe mon temps à apprendre d’eux. »
Son parcours en chiropratique a commencé comme celui de nombreux membres de l’ACC. Le Dr Mior a eu des blessures sportives pendant son adolescence, mais il a obtenu ensuite des résultats rapides et positifs après avoir consulté un chiropraticien.
Même si à l’époque, le Dr Mior ne connaissait pas bien la chiropratique, sa curiosité pour ce domaine s’est éveillée. Il était loin de se douter qu’il deviendrait un jour l’un des éminents chercheurs de la profession.
Comment expliquer l’efficacité remarquable de cette approche pratique sans médicaments?
Après des séances avec ses patients, le Dr Michael Livingston, chiropraticien du Dr Mior, passait du temps avec lui pour discuter de la chiropratique. Il lui a même fait visiter le Canadian Memorial Chiropractic College (CMCC) et l’a présenté au corps enseignant clinique.
« La plupart des conseillers de mon école secondaire m’ont recommandé d’étudier la médecine », dit le Dr Mior. Mais le Dr Livingston lui a mentionné les avantages et les difficultés de la chiropratique, et le Dr Mior a fini par faire une demande d’admission au CMCC. Sa candidature a été acceptée. « Le Dr Livingston avait raison, dit-il. Même si j’ai vécu des moments difficiles au cours de ma carrière de chiropraticien, l’expérience a été très gratifiante dans l’ensemble. »
Le Dr Mior se souvient qu’au début de ses études en chiropratique, on accordait beaucoup d’attention aux mécanismes qui sous-tendaient le travail des chiropraticiens (par exemple, expliquer la douleur et la manière de pratiquer la manipulation). Mais à l’époque, ce travail était encore à un stade embryonnaire, et il y avait peu de chercheurs dans la profession. « J’ai appris très tôt sur le programme de résidence, et je savais ce que je voulais faire. Je m’intéressais à la recherche et j’aimais poser des questions, trouver des réponses et sortir des sentiers battus. »
Pendant qu’il était directeur du programme de résidence au CMCC à la fin des années 1980 et au début des années 1990, le Dr Mior a noté que les chercheurs en chiropratique allaient au-delà de leur approche habituelle, qui consistait à étudier les rouages de leur travail. En effet, ils s’orientaient vers la compréhension du côté clinique des choses, la réalisation d’études observationnelles et transversales, et la participation à des essais contrôlés randomisés.
« À l’époque, nous nous basions sur les données probantes obtenues par d’autres professions, dit le Dr Mior. Mais aujourd’hui, nous pouvons nous appuyer sur notre propre travail – du travail accompli sur le plan international, à un niveau dont je ne pouvais que rêver. »
Lors de sa résidence clinique en 1980, le Dr Mior a passé du temps au Royal University Hospital à Saskatoon, où il a eu l’occasion d’interagir avec des chirurgiens et des chiropraticiens, en plus de voir et de traiter des patients ayant des problèmes de santé dont il n’avait entendu parler que dans des livres. Working with Drs. Son travail de collaboration avec les Drs David Cassidy et William Kirkaldy-Willis l’a beaucoup marqué et a changé l’orientation de ses plans professionnels.
Un choix de carrière s’est présenté lors de sa quatrième année d’études en chiropratique, lorsque le Dr Mior a évalué l’effet de la manipulation de l’articulation sacro-iliaque sur les paramètres de la démarche. Encouragé par le Dr Adrian Grice, il s’est intéressé à la compréhension de la biomécanique sous-jacente et à l’évaluation des techniques de manipulation et de palpation qu’utilisent les chiropraticiens. Dans quelle mesure les méthodes d’évaluation étaient-elles fiables et valides? C’est de là qu’est née une série de collaborations avec la Dre Marion McGregor (DC, Ph. D.), qui visaient à explorer la fiabilité et la validité des interventions cliniques.
Selon le Dr Mior, la profession chiropratique a été poussée à établir des lignes directrices au début des années 1990. « Il y avait un groupe de chiropraticiens avant-gardistes aux États-Unis, dit-il, dirigés par le Dr Scott Haldeman, qui voulait créer des lignes directrices ou des paramètres de soins pour la profession, connus par la suite sous le nom de “Mercy Center document”. Nous avons d’abord évalué l’ensemble du champ d’exercice de la profession et notre travail, et nous avons ensuite déterminé quelles données probantes étaient disponibles pour appuyer ce que nous faisions… Les travaux de recherche menés à l’époque étaient peu nombreux comparativement à aujourd’hui. Toutefois, ils nous ont permis d’examiner la nature et l’étendue de la base de données probantes pour la profession, de voir comment cette base pouvait servir à orienter la pratique et à améliorer ce que nous faisions, et de nous pencher sur la qualité des soins.
« Au Canada, dit-il, nous avons reproduit le processus lié aux lignes directrices américaines sous la direction du Dr Don Henderson. » Cela a été un autre tournant dans la carrière du Dr Mior : « Nous avons établi notre propre comité de consensus et publié les actes. »
Tout au long de sa carrière, le Dr Mior a aussi vu ce qu’il considérait comme des risques pour la profession – surtout au milieu des années 1990, quand les lignes directrices publiées par l’AHCPR ont proposé la technique de manipulation comme l’un des traitements de première intention.
C’était une occasion importante pour les chiropraticiens, car cette technique représente une grande partie de ce qu’ils font.
« Mais j’ai aussi vu ça comme une menace, dit-il. Même si nos interventions, comme les manipulations, sont efficaces, elles ne définissent pas qui nous sommes en tant que chiropraticiens.
« Que se passe-t-il si la prochaine étude publiée n’indique pas que les manipulations sont efficaces? Les gens vont donc remettre en question l’efficacité de la profession chiropratique. » C’est de là qu’a germé son mantra professionnel : « Notre objectif devrait porter sur la meilleure façon de prendre en charge nos patients en utilisant toute l’étendue de nos champs d’exercice. Il ne faudrait pas miser uniquement sur une intervention (c’est-à-dire, un ajustement ou une manipulation) ni être défini par elle ».
Les leaders de la profession commençaient à comprendre l’importance de la qualité des soins et la façon de l’évaluer, en plus de l’impact qui en résulterait sur la pratique.
À la fin des années 1990, le Dr Bob Haig, qui était alors directeur administratif de l’Association chiropratique de l’Ontario, a contacté le Dr Mior pour lui demander s’il voulait participer à un projet qui mobiliserait les chiropraticiens ontariens pour améliorer la collaboration avec les médecins. Son offre est tombée à point nommé, car c’était au moment où les décideurs se concentraient sur l’amélioration des soins primaires – un élément clé étant la collaboration interprofessionnelle. Pendant qu’il travaillait au ministère de la Santé de l’Ontario, le Dr Mior a pu explorer et présenter un modèle de soins centré sur les patients et basé sur la communauté, favorisant la collaboration entre les chiropraticiens et les médecins de famille.
« J’y ai vu une occasion pour les chiropraticiens de s’inscrire dans le courant dominant – et pour en faire partie, vous devez y participer. C’était une opportunité vraiment formidable. »
Mais pour le Dr Mior, le point saillant de cette étude collaborative est survenu pendant une rencontre de l’un de ses groupes de discussion de fin d’études, où il a obtenu les perspectives de médecins, de chiropraticiens et surtout de patients. « Lors de ma dernière réunion de groupe, un patient m’a dit : “Je comprends qu’il s’agit d’une collaboration et de soins centrés sur les patients. Donc, pourquoi n’interagissez-vous pas plus avec les patients? Et pourquoi ne faites-vous pas participer les patients à cette collaboration?” Même si le modèle était centré sur les patients, j’ai réalisé à quel point il était important de comprendre l’expérience des patients et de faire résonner leur voix dans tout ce que nous faisons. J’ai donc réorienté les objectifs de mon travail. »
D’une certaine façon, le reste est passé à l’histoire parce qu’à partir de ce moment-là, la voix des patients s’est intégrée à tout ce que nous faisions.
La question à un million de dollars : Quelle est la suite des choses pour la recherche en chiropratique?
Selon le Dr Mior, les chiropraticiens font face à un grand défi : en plus d’avoir toujours été critiqués, ils ont passé énormément de temps à se défendre. Mais maintenant, le Dr Mior croit que la profession est bien placée pour surmonter ce défi.
« Nous devons continuer à nous concentrer sur ce que nous pouvons faire pour améliorer la santé et le bien-être des gens – des patients. De cette manière, les bienfaits de ce que peut apporter notre profession seront appréciés. Il faut toujours penser à notre inclusion dans l’équipe de soins de santé et dans l’ensemble des prestations des soins de santé. Si nous nous concentrons sur les personnes et les patients dont nous prenons soin, et si nous faisons d’eux une priorité, le reste suivra. »
L’avenir de la recherche en chiropratique est entre bonnes mains. Le Dr Mior continue à travailler avec des chercheurs en chiropratique qu’il a formés en début de carrière, dont bon nombre sont devenus des leaders de la profession. Comme il l’a dit : « Ça a été gratifiant pour moi de les voir s’épanouir et se perfectionner, et de devenir leur “compagnon de bord” ».
« Il est formidable de constater la qualité du travail qui se fait et la qualité des chercheurs diplômés d’un programme en chiropratique, dont certains poursuivent des études supérieures, comme un doctorat. Le nombre de ces chercheurs est à la hausse, et leur travail est absolument extraordinaire. The joint CMCC and Ontario
Le partenariat établi entre le CMCC et l’Institute for Disability and Rehabilitation de l’Université Ontario Tech, dirigé par le Dr Pierre Côté, est un exemple parfait de cette excellence et de cet impact international.
« À mon avis, nous n’avons plus à essayer de prouver qui nous sommes. Il est maintenant temps de nous concentrer sur la façon de mieux contribuer à la santé générale et à la qualité des soins offerts au Canada et ailleurs dans le monde. »